lundi 30 octobre 2017

Daniel Barenboïm et son West-Eastern Divan Orchestra ont captivé la Grande Salle Pierre Boulez

Paris. Philharmonie de Paris. Grande Salle Pierre Boulez. Vendredi 27 octobre 2017

West-Eastern Divan Orchestra. Photo : (c) Bruno Serrou

Pour leur tournée annuelle automnale qui les conduit à Paris, Daniel Barenboïm et son West-Eastern Divan Orchestra ont attiré les foules à la Philharmonie de Paris vendredi soir qui leur ont réservé un accueil triomphal. Coproduit par Piano**** et la Philharmonie de Paris, le concert a réuni deux grandes pages d’orchestre aux contours de poème symphoniques conçues à dix ans d’intervalle à la fin du XIXe siècle, Don Quichotte de Richard Strauss et la Cinquième Symphonie de Piotr Ilitch Tchaïkovski.

Constitué de musiciens israéliens, palestiniens et de plusieurs pays arabes, le West-Eastern Divan Orchestra est une réussite exemplaire, autant d’un point de vue artistique qu’humain. Le nom de l’orchestre se réfère au recueil de douze poèmes de Goethe Le Divan occidental-oriental (1819-1827). L’on sait l’amour que Daniel Barenboïm voue à la musique allemande, particulièrement aux deux grands Richard, Wagner et Strauss. Deux compositeurs longtemps interdits en Israël, mais que Barenboïm a imposé dans ce pays dont il citoyen, ainsi que de trois autres (Argentine, Espagne, Palestine). C’est avec le Don Quichotte, variations fantastiques sur un thème chevaleresque op. 35 de Strauss que Barenboïm a ouvert la soirée. Comme l’on sait, le personnage central est campé par le violoncelle, qui se fait tantôt soliste tantôt tuttiste. C’est l’Autrichien d’origine persane Kian Soltani qui a incarné avec un brio stupéfiant le chevalier à la triste figure, traduisant les aventures de cette personnalité complexe avec un sens de l’épique, du trouble et de la noblesse donnant une densité et une vie de chaque instant. L’altiste israélienne Miriam Manasherov lui a donné une réplique chaleureuse et virtuose en Sancho Panza, tandis que le fils de Daniel Barenboïm, Michael, premier violon du West-Eastern Divan Orchestra, a brossé une Dulcinée lumineuse. Pourtant, l’interprétation de la partition s’est avéré lourde, épaisse, écrasant la polychromie et la fluidité de l’écriture straussienne, sa sensualité et son élasticité.

Kian Soltani (violoncelle), Daniel Barenboïm et le West-Eastern Divan Orchestra. Photo : (c) Bruno Serrou

Après le Cygne de Camille Saint-Saëns dans un arrangement pour violoncelle et orchestre à cordes et un entracte un peu plus long que de coutume, Daniel Barenboïm et son orchestre ont été plus en phase avec le caractère de l’œuvre, brossant de la plus autobiographique des symphonies de Tchaïkovski, la Cinquième en mi mineur op. 64, une lecture d’une puissance évocatrice singulièrement douloureuse mais sans pathos, tous les pupitres, qu’ils soient solistes ou tuttistes, se donnant sans compter et avec un plaisir partagé dans cette éblouissante interprétation. Les contrastes de timbres, le large nuancier, les bois chaleureux, les cuivres étincelants, les cordes avenantes et veloutées ont transporté les auditeurs, qui ont vibré de concert, le souffle coupé au point d’une écoute concentrée et sans faille, d’autant plus que Barenboïm a déployé attaca les quatre mouvements de l’œuvre. 

Bruno Serrou 

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